My Lunch is so delicious. (Tristen)

Oh ciel, qu’était ce donc ce bruit si disgracieux qui l’empêchait de lire avec tous son plaisir et sa concentration ? Qui était donc l’étrange et grossier personnage, tout en supposant qu’un bruit si laid puisse émaner d’un corps humain, qui osait faire ça ? Ce « ça » dessinait une affreuse ride entre ses deux sourcils, et modifiait la surface de son front en des vagues d’interrogations. Frustré, il ne pouvait continuer sa lecture, et posa le livre sur la table en vieux bois d’un bruit qui se voulait menaçant. Mais qui, vous n’en doutez pas, n’était pas plus menaçant qu’un enfant qui aurait fait « Grrrrr » une sucette rose dans la bouche, le tout pédalant un tricycle rouge. Mais le pire, était très certainement qu’il pensait lui-même être effrayant, quand il le souhaitait, car malgré sa naïveté, il devinait bien que ces regards rieurs ou compatissants lui étaient adressé… Mais cette fois, il décida de réagir en homme, que dis-je, de laisser le mâle viril poilu surgir de sa personnalité, et éclabousser tout le monde à coup de… Non pas de jurons, n’exagérons pas ! Déterminé, il se leva du fauteuil en cuir de la bibliothèque qui lui était pourtant paru comme un endroit parfait pour lire la courte nouvelle de Oscar Wilde, Le spectre des Cantervilles.

Mais quel ne fut pas sa surprise lorsqu’il se rendit compte que l’infâme humain qui provoquait ce bruit n’était autre qu’une de ces brutes aux doux visages, que, accesoirement Tristen avait pris pour un autre, et qui, de surcroît avait été le premier à lui lancer une pomme au visage, de même que celui qui avait déclaré ave assurance ; les pommes c’est pour les nuls dans ton genre, les pommes c’est pour les nuls dans ton genre, les pommes c’est pour les nuls dans ton genre, les pommes c’est… Le tout car son discours de présentation dans une autre université lui avait déplut. Il n’osait même plus fermer les yeux de peur de revoir cette scène en cauchemar, et laissa tomber le nombre incalculable de fois où ce cauchemar s’était répété. Il était impensable qu’un si beau visage puisse émettre de telles vulgarités. Et cela, d’ailleurs, ne faisait qu’accroître l’irritation de Tristen envers ce grossier personnage qui avait émis un… Rejet de gaz gastrique, autrement dit un rot. Et seulement ce mot, tout aussi laid que sa signification, était inconcevable à prononcer dans une bouche aussi pure que la sienne. La question, maintenant, était ; allait il réagir ? Tristen allait il signaler à cette brute épaisse qu’il l’avait dérangé avec ce flux gastrique et qu’il ferait mieux de ne pas recommencer ? Les mains dan son pantalon de velours marron, Tristen s’avança de la manière la plus brave et courageuse qu’il aurait pu reproduire. La dite brute leva les yeux d’un bouquin quelconque, et attendit patiemment que Tristen émette un mot. Il n’avait pas l’air méchant, ni brutal, mais au contraire, dans ses yeux bleutés, Tristen pouvait y lire une certaine compassion amicale. Certainement ne se souvenait il pas de la nuit où… Les pommes c’est pour les… Valez mieux ne pas y repenser. Tristen lança un regard lourd de sous entendu, à son avis, et ouvrit ses lèvres rosées pour quelques secondes après les refermer. Décidé, il prit la parole pour enfin lui dire ses quatre vérités, ou du moins, voila quelles étaient ses intentions premières.

« E-e-excusez moi… Q-q-que lisez-vous ? P-pardon, je veux dire ; je-je ne vous dérange pas trop ? »

La brute, que nous continuerons à appeler ainsi, haussa les épaules, et sourit avec compassion pour reprendre sa lecture qui, n’en doutons pas, devait être des plus philosophique. En son fort intérieur, Tristen se demandait ce que faisait cette brute épaisse dans une bibliothèque, il se demandait même si ce n’était pas une mascarade ; depuis quand les brutes de son genre savent elles lire ? Cependant rouge de honte, il rassembla ses affaires avec la plus grande rapidité qu’on lui connaissait et quitta la bibliothèque, sans courir. Courir en s’éloignant de son adversaire était un grand signe de défaite, or, pour soigner son égo, il se disait simplement qu’il s’écartait de tout lieu bondé où il pourrait tranquillement réfléchir à une ruse machiavélique. Et c’est ainsi qu’il pénétra dans la cafétéria de l’université. Toujours tracassé par sa honte passée, c’est sans faire bien attention qu’il prit un plateau ainsi que les premiers plats qui lui passèrent sous le nez. Rappelez vous qu’il n’était pas un fin gourmet, et même en toute lucidité, le jeune homme ne faisait pas très attention à ce que ses mains choisissaient. C’est aussi à cause de cette inattention qu’on peut dire : et là, c’est le drame. En effet, une espèce de grosse chevelure brune vient obscurcir sa trajectoire, le faisant dévier avec maladresse vers une autre personne qu’il ne manque pas de percuter avec sa propre personne et… Mais quelle belle tache sur ce pantalon, dîtes vous ?

Tristen se statufia pendant un court instant, hésitant entre deux alternatives : partir en courant et prier que personne n’ait reconnu son visage, chose fortement impossible, ou alors… Agir tel… Tel… Tel le quoi ? Echappant de son état de statut, il baissa la tête sans pour autant avoir encore vu le visage de la victime de son café.

« Ex-ex-cusez moi… Je-je… Comment puis je me faire pardonner ? »

« Ex-ex-cusez moi… Je-je… Comment puis je me faire pardonner ? »

Attendant quelques secondes, Diane eut une expression interdite quand elle vit le pauvre garçon se confondre en escuses. Pourtant, elle n'avait pas eu une réaction trop "méchante". Pour une fois, elle avait gardé son calme, voulant éviter de créer une émeute dans la caféteria. Evidemment, tout le monde la regardait à présent, ce qui créa une sorte de gêne personnelle. Elle décida de ne pas perdre son sang froid et se leva doucement, sans toujours ne dire aucun mot. Laissant le garçon en plan pour quelques secondes, la jeune femme se rendit au robinet juste en face et épongea doucement avec un morceau de serviette pris au passage. Fermant les yeux, elle évita de penser aux moqueries qu'on se faisait sur elle. Ne se rendant pas compte de son égoisme actuel, Diane observa son jean qui était à présent plus très propre. A force de vouloir enlever la tache, elle s'était certes éclaircie mais étendue. Pourtant, Diane n'avait pas fini son repas et son ventre lui montrait à quel point il avait faim. Et puis, elle devait s'occuper de l'autre là, lui dire que ce n'est pas grave et qu'il ne fallait pas qu'il se tape la tête contre le mur pour ça. Il en avait l'air capable, Diane le prenait un peu pour un dépressif. Alors qu'en fait, il était pas mal. Brun aux yeux marrons, grand, mince mais avec des attitudes légèrement...coincées. Revenant jusqu'à sa table, Diane ramassa la tasse de café qui avait glissée par terre et qui était indemne puis la posa sur la table, esquissant un petit sourire froid à son destinataire. C'est sûr, elle allait l'éviter celui là. A côté de Sam, celui là était bien pire. En fait, pas tant que ça. Le pauvre avait l'air dépité et tellement sincère en s'escusant que Diane s'autorisa elle même à lui donner un peu de son temps, histoire de mettre les choses au clair avec lui. Il avait l'air assez perturbé comme ça, ce n'était pas comme si il venait de commettre un crime.

« Euh, mais c'est pas si grave que ça, tu n'as pas à vouloir régler le problème..enfin..euh...allez, assieds toi un moment. »

Sur le moment, elle le prenait en pitié, tellement Diane pensait qu'il pouvait sauter d'un pont juste pour une histoire de jean taché. Pourtant elle se défendit à le revoir, ou alors, la prochaine fois, ne pas vraiment lui parler. Elle le détestait au fond d'elle, tellement énervant à bafouiller comme ça. Une bonne dose de vodka ne lui ferait aucun mal. Une bonne âme bienfaisante apporta une tasse de café qu'elle posa devant son voisin, avant de mettre les mains autour de sa bouteille d'eau pétillante et d'en avaler une gorgée.
Ce qui était bien, c'est qu'à présent, plus personne ne les regardait. Le visage baissé, un gros blanc s'installa entre Diane et le garçon. Après tout, c'était simplement pour essayer de lui montrer qu'elle ne lui en voulait pas même si c'était tout le contraire. Heureusement qu'il avait l'air sincère, sinon Diane lui aurait fait acheté un nouveau jean. En plus, c'en était un de marque, hein.
Mais bon, faisons la gentille Diane, pour une fois. Celle ci replaça une mèche de cheveux derrière son oreille et lui parla doucement. On allait commençer par se présenter et puis on verra.

« Moi c'est Diane. »

Dieu seul sait combien il détestait cela, et tous ces yeux posés sur eux le mettait affreusement mal à l’aise. Bien qu’en fait, on pouvait se demander si il pouvait être plus mal à l’aise qu’il l’était déjà. Que devait on réellement faire dans ce genre de situation ? Tristen avait beau repasser le résumé de divers œuvres dans sa tête, rien n’y faisait, et il était clair que seuls les héros les plus profondément stupides avaient droit à ce genre de… Non, en effet, attirer l’attention de tous le monde ainsi n’était pas digne de son futur lui-même. Mais ses bonnes intentions le rattrapèrent, il leva brusquement la tête dans l’espoir d’apercevoir la victime de son café, seulement, elle avait déjà disparu. Inquiet, il adressa des regards à toute la cafétéria, fronçant les sourcils et dessinant des vagues d’inquiétudes sur sa peau laiteuse, il passa une main dans sa chevelure blonde et se demanda encore une fois ce qu’il était censé faire. Ce que toute personne un tant soit peu… Sortie d’un roman de Oscar Wilde aurait fait. Ne trouvant manifestement pas, cela l’énerva, et le froncement de ses sourcils clairs s’accentua, non pour la raison que la plus part des étudiants qui se trouvait ici devait penser. Gens qu’il avait d’ailleurs occulté. De ce fait, il était resté debout, tel le petit bouleau ridiculement grand et maigre.
C’était évident, il devait prendre ça comme un test, ou même un jeu. Soulagé, il prit place sur une banquette et prit la pomme verte de son plateau, l’apportant lentement à ses lèvres, il s’apprêtait à la croquer lorsque la victime du café refit son apparition. Il était plus qu’aisé de la reconnaître grâce à la tache de café qui s’était certes légèrement effacée, mais aussi étalée. Il se demanda si il devait lui proposer de lui offrir le pressing ou… Que savait il d’autre, et pour se faire, il se leva. Mais elle le devança, tout en lui proposant de s’asseoir, il s’exécuta.

« Moi c'est Diane. »

Il rattrapa la pomme verte de ses doigts joueur puis l’apporta à ses lèvres pour enfin la croquer. La victime du café s’appelait donc Diane… En toute sincérité, il se demanda ce qu’elle-même attendait de lui après lui avoir dit son prénom. Il était presque impensable qu’elle s’intéresse réellement à lui, ses regards évasifs vers le reste des étudiants qui continuait de les regarder, certes avec moins d’insistance, étaient assez explicites. Et c’est avec son innocence habituelle qu’il la scruta de plus près, tout en dégustant sa pomme. Il relâcha enfin ses sourcils, prenant conscience qu’il n’y avait pas de quoi s’inquiéter, ni paniquer, si c’était un test, il le réussirait, comme il réussissait toujours ses tests. Il lâcha sa pomme qui n’était plus qu’un trognon pour s’en emparer d’une autre ; sa main bienveillante aimait les pommes, c’était un fait. Il reprit de ses doigts joueurs, faisant onduler la pomme dans sa main.

« Enchanté Diane, je suis Tristen. J’espère que ton pantalon n’en veut pas trop à mon café. Il est navré. » Dit il sur un même ton lent. Chose plutôt étonnante, il se mit subitement à étirer ses lèvres en un sourire... Et, est ce bien bien de l'humour ou quelque chose qui y ressemblait vaguement que l'on pouvait sentir dans sa phrase ? Où est la corde de l'agneau ?